Plus jamais ça (by NGASHANI NSIBIRA Albert)
L’histoire de Kanii, preuve d’écriture, mène qui le lit, parle. C’est là que revient la question de définir l’écriture. En fait, c’est quoi écrire ? Une question que pose le texte ici proposée par le jeune écrivain Ngashani Nsibira Albert.
Écrire, c’est accoucher, communiquer, composer, correspondre, exposer, fixer, former, inscrire, marquer, produire, révéler, s’engager. Écrire, c’est se montrer tout nu à travers un ensemble de signes organisés, la cervelle ouverte au lecteur. Dans le sens, l’activité consiste à veiller en espérant agir sur le monde. Le jeune écrivain Ngashani Nsibira Albert l’a si bien compris qu’il a décidé de s’y mettre.
Écrire étant aussi mentir un peu, il est alors difficile de le faire vraiment parce que nous sommes incapables de transposer la réalité sur un papier. Est-ce pour autant qu’il faut cesser d’écrire ? Ngashani nous dit non. Que d’événements envahissent nos yeux. Que d’histoires chatouillent nos oreilles. Pour peu qu’on ne soit ni aveugle ni sourd, dire à l’autre ce qu’on a vu ou entendu, à quoi on a pensé, voilà écrire.
Le jeune écrivain Ngashani Nsibira Albert répond également à une autre préoccupation qui, peut-être t’agace aussi. Qui doit écrire ?
Je n’y avais jamais pensé, je ne m’étais jamais imaginé que j’écrirai un livre, me disait-il. Mais, l’ampleur des événements de Kanii me fit comme un pincement au cœur que je me décidai, désormais, de le dire aux autres, poursuivait-il. C’est que ni l’âge, ni la situation sociale, moins encore les finances ne constitueront non plus de blocage. Tout dépend de la détermination de l’artiste, ai-je compris l’élan de notre jeune écrivain.
Ngashani Nsibira Albert, étudiant congolais, démontre clairement que l’écriture est la meilleure des thérapies et le plus difficile des accouchements. Mais j’aimerais attirer l’attention des lecteurs sur le fait que consigner ses émotions sur un papier peut être aussi salutaire que destructeur. Des idées à la fiction, l’écriture est sans limite parce que son analyse l’est à la lumière de l’expérience du lecteur. Grande, cette expérience ouvre à une interprétation plus ou moins correcte. Petite, elle conduit à des dérives interprétatives, sources d’innombrables confusions.
Dans ses discrétions, le jeune écrivain Ngashani Nsibira Albert m’a révélé que l’histoire ici racontée tenait à sa gorge depuis plusieurs années. Décidé de contribuer à la paix dans sa région embrasée par divers conflits, par une visée purement cathartique, il a arrêté le temps en vue de créer une certaine solidarité avec ses lecteurs. À la lecture de l’œuvre, le mal décrit devra être utilisé comme une leçon, un désordre à éviter et prendre la ferme décision : plus jamais ça.
Le recours aux réalités culturelles africaines prouve visiblement un objectif affiché celui de construire une société heureuse, paisible, vivable. Telle est la voie du bonheur communautaire selon l'ordre de l'unité, la réconciliation, la responsabilité, avec la conviction de fond d'être nous-mêmes, c'est-à-dire nous identifier à partir de nos valeurs. Voilà le cri lancé par le stylo du jeune écrivain Ngashani Nsibira Albert.
Plus jamais ça! Longue vie, agis.
Enseignant et écrivain